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[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier.

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Message par Le Valet Noir 01.10.21 21:21

[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. 1632946765-reunion-secrete-parmi-les-ruines

Par quelque moyen que ce soit, quel que soit leur rang, les Doigts avaient reçu l'appel des Têtes et y avaient répondu : lorsque la nuit enveloppa la cité des mercenaires, le Lépreux Chauve accueillit leurs âmes damnées.

« Je suis scientifique, expliquait un Zobal sur l’épaule duquel était perché un Nomoon, j'ai besoin de m'instruire avec les travaux d'autrui.
— Il semblerait que tu aies été entendu
, observa la tenancière, une Eniripsa aveugle.
— Oh, Kalirr !
s’exclama un Osamodas à la peau bleutée alors que le Valet de Trèfle pénétrait dans l’établissement. Je suis si content de te revoir ! »

Le dénommé Kalirr referma la porte derrière lui, laissant les bruits de bottes d'une patrouille s'atténuer.

« Vous êtes juste fermés d'esprit, poursuivit le Zobal tandis que la Tête du Trèfle saluait l’assemblée.
— Bonsoir Kalirr. »
répondit un second Zobal, fier représentant de l’Enseigne du Carreau.

L’Eniripsa salua d’un coup de tête en direction de la voix du nouveau venu, tandis qu’un Ecaflip mal léché levait ses yeux fatigués vers l’Osamodas au couvre-chef inimitable. Une adepte de Crâ ponctua cette entrée — suivie de celle d’un petit homme grisonnant — d’un lever de chope respectueux.

Kalirr observait l'assemblée, Emyn Muil à son côté.

« Alors, il se passe quoi ? » s’enquit le preux Garnan.

Deux Têtes d'un coup ? se dit Kucci l’Ecaflip. Ça doit être du sérieux, cette histoire.

« Camille, commanda le Valet Bleu après s’être raclé la gorge de dépit en dénombrant le trop petit nombre de Doigts ayant répondu à leur appel, verrouille toutes les issues, je te prie. Cette réunion est privée et tous nos hôtes sont arrivés. »

Une longue série de craquements suivit l’ordre, attestant de la fermeture des diverses portes et fenêtres du débit de boisson.

« Bon, il se passe quoi à la fin ? » s’enquit Adellan.

Kalirr dévisagea un à un les Doigts présents, regrettant le sous-effectif de membres valeureux parmi eux.

« Il se passe... de lourds évènements, commença l’Osamodas.
— C'est à dire ?
le pressa Garnan.
— Crache le morceau, Kalirr ! Siffla l’adoratrice de la Divine Chasseresse en lançant l’un de ses couteaux en plein coeur d’une cible suspendue à un mur opposé.
— Nous allons en parler, soyez-en assurés, répondit l’interpellé. Mais pas ici.
— On va taper les Pandawas ?
Interrogea le Zobal du Carreau.
— C'était bien la peine de tout fermer, maugréa l’Eniripsa sise derrière son comptoir.
— Astrub n'est pas sûre
, expliqua Kalirr. Du moins, elle ne l'est plus.
— Venez-en au fait, non ? »
le pressa pourtant Kucci.

Secouant la tête en signe de dénégation, le Valet de Trèfle annonça :

« C'est au sud des champs d'Amakna que nous nous donnerons rendez-vous.
— A vrai dire,
intervint le Roi de Coeur, peu de choses sont encore assurées, pour ce qui concerne la Main du... Valet Noir, en tout cas.
— Arrêtez de faire des mystères
, râla le Zobal du Pique tandis que Shanigami proposait de se retrouver dans une clairière de sa connaissance. A l’en croire, il avait l’habitude d’y conter fleurette.
— Les mystères seront levés sous peu, le rassura Emyn Muil. »



C’est par binômes que le voyage eut lieu : Instylena et Shanigami reformèrent leur couple, Adellan et Kucci se choisirent mutuellement, et Aphrodiane accepta, bon gré mal gré, la présence de Garnan à ses côtés.

Le premier duo quitta Astrub un quart d’heure plus tard, à bord d’une voiture à l’attelage rapide qui le mena au nord des Champs d’Amakna. Ils traversèrent ces derniers en faisant route vers le sud.
Kucci et Adellan partirent en dragodinde sur la grand-route qui menait au Château d’Amakna et coupait à travers son enceinte. A cette heure indue, les herses avaient été abaissées, mais le Coeur, prévoyant, leur avait préparé deux laissez-passer criant d’authenticité.
La voie réservée au troisième couple était plus dangereuse, mais rien d’insurmontable pour des énergumènes aussi aguerris. Ils firent route vers l’ouest, en direction d’un col montagneux.

Tous avaient pour point de ralliement une petite grange érigée à l’extrême sud-ouest des champs d’Amakna. Impossible de se méprendre : un hibou avait été discrètement gravé sur le linteau de la porte.

Quelques chandelles avaient été allumées pour permettre aux participants à cette réunion inopinée de se voir les uns les autres. Le mobilier, sommaire, permettait de s’asseoir, à défaut de récupérer confortablement de la route. Shanigami eut la délicatesse de décrire les lieux à sa compagne frappée de cécité tandis que certains Doigts commençaient à s’invectiver au sujet du retard de l’archère et de son compagnon Zobal.

Ces derniers arrivèrent sur ces entrefaits, ce qui permit à Kalirr de révéler qu’il leur faudrait tous encore marcher. Mais ensemble, cette fois-ci. Les Têtes présentes avaient quelque chose à leur montrer. Les Doigts poursuivirent leurs discussions alors qu'ils quittaient la grange et se dirigèrent vers le sud, jusqu’à parvenir à l’orée d’un bois comme il en existe tant en Terra Amakna.

Alors que les Doigts invités se demandaient ce qu’ils faisaient en un pareil endroit, le carillon particulier de sinistres grelots précéda l’apparition d’une silhouette émergeant du sous-bois.

« Oh non… pensa, terrifié, le Zobal dresseur de primate.
— Et voilà notre arlequine ! fit remarquer Instylena, dont l’ouïe n’était plus à présenter.
— Arlène ?!!! s’étouffa Shanigami, alors que Garnan saluait avec humeur l’arrivante.
— Salut, les aminches ! s’exclama cette dernière avant d’aussitôt baisser la voix. Z’avez pas été suivis ? »

Une série de négations s’ensuivit, bien vite éclipsée par une salve d’interrogations justifiées.

« Bon, on va se battre contre qui ? voulut savoir l’un.
— Venons-en au fait ! martela un autre.
— Une fête ? s’étonna le Valet de Pique, d’une voix où perçait la fatigue. Y a pas d'fête, c'soir, l'arsouille ! »

L’Arlène désigna la lisière, derrière elle, et fit mine aux Doigts de la suivre.

« J'espère que vous avez l'oeil, et l'bon, parce qu'on va crapahuter quelques temps là-dedans ! annonça-t-elle une fois que le dernier d’entre eux eut achevé de pénétrer sous les frondaisons.
— T'as pensé à ta pelle, Kalirr ? lança Instylena. J'ai des souvenirs qui remontent…
— Mouais
, marmonna l’intéressé.
— Je crois que j'ai les mêmes souvenirs que toi, Insty’...
annonça Aphrodiane la chasseresse.
— Si vous apercevez des... Euh… commença l’arlequine. Des sangliers, voire plus gros que ça...
— Des sangliers ?
s’enthousiasmèrent Garnan et Shanigami.
— Ouais, leur répondit la fardée de blanc, y en a une belle compagnie, ici. Mais mieux vaut éviter de leur chercher des noises… jugea-t-elle bon de préciser.
— Mais qu'est-ce qu'on fait là, à la fin ? s’agaça Adellan, alors qu’il venait de trébucher pour la troisième fois depuis qu’ils avaient commencé à avancer au beau milieu d’un roncier.
— J'vous racont'rai ! lui promit leur guide. On va s'prom'ner dans le bois, vérifier que l'Mulou... y est pas. C'est qu'il y a pas grand-monde qui passe, ici.
— Ne la quittez pas des yeux
, les admonesta Kalirr.
— On a tôt fait de se perdre, dans les parages…
précisa Emyn.
— Advienne que pourraaaa ! glapit Adellan lorsqu’il perdit l’équilibre, entraînant dans sa chute l’aveugle qui le précédait.
— Rah, foutredieux ! pesta sa victime.
— Insty’, tu veux que je te décrive les arbres ? lui proposa le serviable Shanigami.
— Décris-moi surtout le sol, que je m'en sorte.
— Le sol est... très plat, et y a des cailloux, des… Des grosses flaques d'eau.
— Ça va aller, Insty' ?
— Fais-moi donc éviter les flaques. Ouais-ouais, ça ira ! J'ai parcouru mon quota de forêts, je devrais m'en sortir…
Elle bougonnait. La peste soit d'Orgo’ et d'Eniripsa.
— On va où, Arlène ?
s’enquit un Garnan à peine essoufflé.
— C'est un peu plus loin... 'faut avancer, encore. Suivez bien la sente, là, mais ne la confondez pas avec une coulée comme… Comme celle-ci ! »

Leur expédition nocturne continua et, tandis qu’Adellan s’appliquait à nommer les différentes plantes rencontrées pour éduquer son Nanab de Nomoon, le Valet de Trèfle se mit à rêvasser.

Qu’elle était étrange, cette forêt, sans Ses oiseaux...

Une demi-heure de marche s'écoula — elle en avait paru le double, au vu de la nature accidentée du terrain — et la petite troupe pénétra dans une clairière où une âcre odeur de brûlé leur assaillit les narines. Sous la voûte céleste s’élançait ce qui subsistait d’un manoir forestier ravagé par un incendie.

« Ça a bien brûlé, commenta Aphrodiane.
— Mais…
s’étonna Shanigami l’ingénu. Qui s’est amusé à mettre des pierres brisées au milieu de cette forêt ?
— C'est quoi ça encore ?
s’étonna Adellan alors que glapissait Nanab.
— Oulah, oui ! Qu’est-ce que c’est que ça ? » répéta son homologue Zobal.

Kucci fut le seul à demeurer silencieux, perdu dans la contemplation d’un pareil spectacle.

« Nous sommes arrivés, annonça Emyn.
— Heu
, hésita l’Osamodas du Coeur… Là, Insty’, c'est compliqué de te décrire.
— Ruine
, annonça sobrement le Compagnon du Pique.
— Bienv'nue au manoir !
leur sourit mollement l’Arlène. Ou, plutôt, c'qu'il en reste...
— C'est quoi ce temple ?
— Quel manoir ?
— Le manoir ?
— Le manoir de…
essaya d’expliquer l’arlequine.
— LE Manoir ? s’écria un Garnan qui commençait à comprendre.
— Bienvenue chez le Valet, résuma le Compagnon du Trèfle.
— Chez Kalirr ?
hasarda Shanigami.
— Je sens qu'on va bien s'amuser… » lui répondit l’Eniripsa.

Emyn-Muil regardait tristement les ruines silencieuses, un Kucci pensif à ses côtés.

« Le Valet ? Celui qu’on voit jamais ? railla le Zobal du Pique.
— Il s'est passé quoi, ici ? s’excitait celui du Carreau. Et pourquoi Scriabine est pas là, d'ailleurs ?
— Et si on nous expliquait ce qu’il s’est passé ?
rappela Aphrodiane aux Têtes présentes.
— Insty' doit l'sentir, ça a brûlé, commença Arlène. Rentrez à l'intérieur, pas à la va-vite, ça flambe encore par endroits... Même après plusieurs semaines.
— Qu'est-ce que ça signifie ?
s’impatientait Adellan en s’assurant que son masque du moment était bien fixé. Le Valet est mort ? Là ?
— MERDE
, hoqueta Instylena à cette simple idée.
— Je ne comprends pas
, gémissait Shanigami... Pourquoi on nous a amenés ici ? C'est normal, les flammes et les murs pas finis ?
— Le pote de Nanab a vu juste, ouais…
souffla l’arlequine.
— C'est une page de l'histoire de la Main qui se tourne, annonça le Roi de Coeur en venant au secours de sa camarade.
— Installons-nous là où, autrefois, l'Antichambre Noire était le centre de la Main du Valet Noir
, proposa Kalirr. Nous y répondrons à vos questions. »



Kucci tourna la tête vers Arlène, ses pupilles se dilatant brusquement. Il n’avait pas encore eu l’occasion de la voir dans pareil état. Son épuisement, aussi bien physique que mental, sautait aux yeux, maintenant qu’elle avait accompli la tâche de les guider jusqu’aux ruines.

« On suppose qu'il s'est produit un incendie... évoqua-t-elle. Et qu'avec ce qui était stocké ici, ça a dégénéré.
— Shani’, le Valet est mort. Dans l'incendie.
— Le Valet... Mais... Mais on sait même pas s'il existe…
renifla le cornu bleu.
— Oh, il existe… acquiesça l’acrobate du Pique. Enfin, il existait. Gaffe, Collyre ! C'est pas stable, là-dedans ! »

Dehors non plus… lui répondit mentalement Kalirr.

Le Valet de Trèfle avait joué des coudes pour approcher des ruines. Il inspira un bon coup et pénétra dans ce qui avait été le Saint des malsains. Kucci parvint enfin à articuler, la gorge serrée :

« Pourquoi nous montrer ça maintenant ?
— T'aurais préféré n’pas savoir, chaton ?
— Si. Si, bien sûr. »

Kalirr caressait l’une des dernières pierres encore debout.

« Ça ne répond pas à ma question, renchérit l’Ecaflip.
— J'ai passé les derniers temps à surveiller les ruines et empêcher les curieux de v'nir se servir
, lui répondit l’autre aux clochettes. Le temps qu'Emyn et Kalirr apprennent la nouvelle, il s'est écoulé un moment.
— Bon, on entre ?
proposa l’Eniripsa. Kalirr a dit qu'on allait dans l'ancienne antichambre, non ?
— Y a plus vraiment de porte, Insty’
, lui rétorqua Shanigami. Et je ne sais pas où c’est.
— C'est là
, leur cria la Tête du Trèfle depuis l’intérieur des ruines.
— Eh bah tu suis le monsieur bleu avec un chapeau
, tança le Compagnon de la même Enseigne.
— Ou, du moins, c'était là
, ajouta, plus bas, son Valet. »

L’Osamodas du Coeur se retourna vers l’acrobate du Pique.

« Arlène... Comment ça se fait que... qu'il n’se soit pas enfui…?
— J'sais pas, Shani'... J'en sais rien. C'est allé tellement vite ! »


Kucci ne parvenait pas à détacher son regard de la bâtisse.

« Y a-t-il quelque chose d'autre que vous voudriez nous montrer ? »

A cette question, la grelottante lança un regard implorant en direction du Roi de Coeur et du Valet de Trèfle.

« Y a plein d'choses qu'il faudrait vous montrer, l’arsouille.
— Venez...
vint les chercher Adellan. On sera mieux à l'intérieur ! »

La tête que fit Arlène signifiait tout le contraire.

Réunis prudemment au beau milieu de ce qui avait été un centre névralgique des opérations de la Main, ses derniers agents se regardaient les uns les autres. Aucun n’osant prendre la parole, de peur de brusquer les événements ou d’attenter à la mémoire des lieux.

« Maintenant que le Vieux est mort, commença Arlène, 'faut qu'on discute de… son héritage.
— Son héritage ?!
s’offusqua Shanigami. Je refuse de voler le Valet... C'était notre... C'était lui qui veillait sur nous, après tout !
— Qui est le chef maintenant ?
demanda Garnan de but en blanc.
— Les Têtes ? supposa l’anthropologue au Nomoon.
— Eh bien… hésita Emyn Muil. Cette bâtisse n'abritera désormais plus que des fantômes…
— Des souvenirs, des légendes
, ajouta le Valet de Pique.
— ... et les mauvaises herbes
, poursuivit l’alchimiste aux cheveux poivre et sel. Effectivement, le Valet Noir a péri ici, tragiquement.
— Où est le corps du Valet ?
demanda Shanigami.
— J'ai trouvé des fragments d'os parmi les débris, lui indiqua l’arlequine. Il devait être à l'étage quand ça... Quand ça s'est produit.
— Peu de choses ont survécu à l'incendie, hélas…
regretta le Roi de Coeur.
— Mais j'peux pas dire que ce sont les siens, précisa sa consoeur. »

Adellan intervint à nouveau.

« Où sont-ils ? Les os ? »

La gardienne des lieux lui désigna une partie du bâtiment carbonisé.

« Ne devrions-nous pas les conserver ? questionna l’agent du Coeur à la peau bleutée. Maître Emyn, vous être un fin alchimiste, peut-être pourriez-vous découvrir leur provenance, et… »

Kucci toussota.

« Écoutons ce qu'Arlène a à nous dire.
— C'que j'ai à v…
Elle ne semblait pas comprendre. Ah, oui ! C'est z'ici que j'ai rencontré l'Vieux pour la première fois. C'est dans une autre salle qu'il m'a r'mis mon Dix de Pique.  Bien avant qu'les autres me catapultent Valoche Noire. C'était y a des années, ça !
— Le Valet Noir en personne ?
lui fut-il demandé.
— Ouais, Bleuet ! A l'époque, y avait trois autres Têtes. Dont Mymyn et la Matriarche. Et Collyre nous a r'joints par la suite.
— Que sont-elles devenues ?
intervint Kucci.
— Il nous faut également annoncer, jugea bon d’intervenir Emyn, que nous n'avons plus de nouvelles de Scriabine depuis plus d'un mois.
— ...
— Scria-quoi ?
— Elle est morte ?
— C'est possible.
— Nous ne savons pas.
— C'est suspect.
— Il semblerait que le navire dans lequel elle était a explosé en pleine mer. »


Muni de son carnet, Adellan prenait littéralement note de ce qu'il se passait en temps réel, concentré sur les échanges.

« C'est problématique, grogna Garnan tandis que Shanigami tombait des nues.
— Je ne peux pas croire que ma Dame et que le Valet... C'était des gens si talentueux, ils ne peuvent pas être morts comme ça !
— C'est un problème
, statua Kalirr. Un vrai problème. Par son statut de Dame de Coeur, Scriabine savait tout. Perdre ce savoir, c'est comme perdre ce manoir.
— La Main du... Valet Noir a effectivement perdu beaucoup en peu de temps
, confirma Emyn Muil.
— Tout ça au sortir d'cette guéguerre avec les Opalins…
murmura Arlène.
— Nous venons de perdre le général de notre régiment, tonna Garnan, nous devons donc en nommer un nouveau ! »

Shanigami serrait les poings, et la main d'Instylena par la même occasion. Le Roi de Coeur poursuivit ses explications.

« La plus grande partie du Trésor du Valet Noir a également disparu dans l'incendie
— Mais Mymyn…
le coupa l’arlequine. J't'ai dit que j'suis sûre qu'on peut essayer de... Elle balaya les ruines d’un geste de la main. J'sais pas, moi... De... De fouiller ! Tout n'peut pas avoir cramé ! Y avait les caves, la cache, le…
— Je veux bien fouiller, moi
, se proposa Adellan en interrompant sa prise de notes effrénée.
— Attention aux flammes, tout de même, le tempéra Kalirr. Certaines ne sont pas naturelles...
— Peut-être que le corps du Valet est là !
espérait Shanigami.
—  Le corps du Valet ? Non, Shani', c'pas possib', ça… le détrompa-t-on. Comment qu'tu veux qu'il ait fait ?
— T'en sais rien ! Vous êtes tous là à parler de sa mort comme si c'était une évidence...
— Le Valet Noir, tout puissant qu'il fut, n'était qu'un homme, Shanigami.
— Mais c'est le VALET ! Il n'a pas pu ne pas prévoir quelque chose pour... ce genre de chose.
— S'il avait survécu, j'l'aurais r'trouvé depuis le temps, non ?
— Moi j'ai une autre question
, intervint Instylena. Certains d'entre vous l'ont connu, et je suis sincèrement désolée pour vous. Mais pourquoi tout le monde agit comme si le monde s'était arrêté de tourner ? »

Désolés ? Ne le soyez pas, pensa tout bas Kalirr.

« C'est vrai, asséna Garnan. En plus, on le voyait jamais ce mec.
— Écoutons-nous
, le rappela à l’ordre Kucci. Pour une fois.
— Mon allégeance va aux Têtes,
continua Instylena, à ceux qui m'ont tendu la Main et à ceux qui m'ont aidé à survivre en récompense de mes services. Je suis désolée pour la mort du Valet, mais pour beaucoup d'entre nous ce n'était qu'un nom. Une légende, une histoire, mais un nom.
— Je pense que, si les Têtes sont là, c'est grâce au Valet
, objecta Shanigami. »

Kucci ne put s'empêcher de hocher la tête, malgré lui. Il réprima rapidement ce mouvement.

« Mais il faisait rien, s’indigna Adellan. Plus rien en tout cas.
— Ça,
grimaçait Arlène, t'en sais rien, l'arsouille…
— Demandons à ceux qui le connaissaient vraiment, dans ce cas. Arlène, Kalirr, Emyn, vous devez avoir des idées plus réalistes que nous à son sujet.
— La perte du Manoir et du Valet est un coup terrible porté à l'organisation,
déplora l’Eniripsa du Trèfle, et d'autant plus si nous avons également perdu Dame Scriabine. Mais la Main ne s'est-elle pas déjà relevée de pire ?
— Nous n'avons pas besoin du Valet pour vivre !
martela avec conviction le Zobal du Carreau.
— C'est bien l'objet de cette rencontre, concéda Kalirr avec calme. Nous nous tenons ici sur les ruines du passé pour nous projeter vers l'avenir.
— Bien qu'il s'annonce assez terne, pour l'instant
, tempéra Emyn.
— Qui a dit que c'était la fin de la Main ?
reprit le Zobal du Pique. Je vois pas le problème.
— La fin est proche, pour nous
, continua d’exposer l’argentier chapeauté.
— Kalirr...
Shanigami était perdu. Que veux-tu que nous décidions exactement ?
— Nous ne sommes plus qu'une poignée
, lui répondit l’autre. »

Garnan se rengorgea.

« Il reste les meilleurs ! »

Kalirr fit mine de n’avoir rien entendu et déroula la liste des faits.

« Nos biens les plus précieux sont détruits. Nos anciens alliés nous tournent le dos.
—  'va falloir cravacher pour s'relever
, assura Arlène. Ça va être intense.
— Nous n'avons jamais été trop nombreux
, regretta l’infortuné Osamodas du Coeur.
— Que sais-tu de notre nombre véritable, Shani’ ?
lui rétorqua son semblable du Trèfle.
— Même si nous étions dix mille, on ne travaille toujours que par groupe de deux ou trois, rappela Shanigami.
— Il fut un temps, pas si lointain, où la Main avait nombre de ramifications. »



Instylena se voulut positive, un fait suffisamment rare pour être remarqué de tous :

« Nous avons toujours le Lépreux Chauve. Nous avons toujours des partenaires, des associés, des contacts. S'il faut repartir de peu, au moins, nous ne repartirons pas de rien.
— Certes. Ayez tout du moins à l'esprit que les caisses sont vides. Pire, nous devons de l'argent.
— Et c't argent va pas arriver tout seul…
tintinnabula la femme aux clochettes.
— De mes souvenirs des archives, évoqua l’aveugle, la situation était pire que celle-ci avant l'arrivée de certains.
— La guerre contre les Opalins a coûté très cher. Trop cher.
— L'argent,
objecta Instylena, on a toujours su le faire. Et en trouver.
—  Attendez...
Un soupçon d’inquiétude perçait dans la voix du maître de Nanab. On sera pas payés ce mois-ci ?
— On va avoir fort à faire avec Collyre.
— L'argent, tu l’as toujours trouvé lorsqu'il manquait, Kalirr.
— Bleusaille, c'est pas sur Kalirr qu'il faut compter ! 'faut que tout l'monde se retrousse les manches !
— On a du pain sur la planche. »


Emyn Muil formula clairement les choses :

« Il va falloir mettre à profit les compétences de tout le monde pour nous relever.
— Si tout le monde s'y met, on repartira bien.
Galmös ! Ça, ça me semble bien !
— Hum…
Cette discussion laissait Aphrodiane de marbre, mais Emyn Muil déroula le fil de sa pensée.
— Les responsabilités qui vont être les vôtres, si toutefois vous acceptez de relever le défi, ne peuvent échoir à des Acolytes.
— Quoi, vous basez nos compétences sur des bouts de carton ?
s’offusqua, une énième fois, le jeune Zobal du Pique.
— Aux shushus les cartes ! Nous sommes tous ici, nous sommes tous au courant et nous avons tous fait nos preuves.
— Sans doute sera-t-il profitable de simplifier un peu le fonctionnement de l'organisation
, poursuivit le vieil alchimiste. Tâchons de travailler sur un pied d'égalité à rebâtir cette vieille maison. Et de mettre à profit de ce que chacun de vous sait faire le mieux.
— Ensemble
, ponctua l’arlequine.
— Aussi avons-nous pris la décision de tous vous inviter à la nouvelle Table des Compagnons.
— Si ça vous botte, huhu.
— Oh ? J'adhère
, répondit Adellan en retournant sa veste plus rapidement que Nanab engloutissait une bananagrume.
— Je suis pour !
s’enthousiasma Garnan, alors qu’Aphrodiane manifestait son désintérêt de la chose aussi laconiquement que d’ordinaire.
— Une Grande Tablée... Pour préparer le Grand Soir.
— Reconnaissance des services rendus, des risques encourus, tous égaux ! »


Kucci était estomaqué : celle-ci, il ne l’avait pas vue venir.

« Une nouvelle Table des Compagnons où chaque voix comptera à égalité…
—  Ce n'était pas le cas de la précédente Table des Compagnons ?
— A cette Table, y avait toujours l'ombre des Têtes qui planait, le cornu.
— J'ai une remarque à faire
, fit valoir Instylena. Tout d'abord, sachez que je n'ai rien contre cette tablée. En revanche, pourquoi garder ce nom de « Compagnons » ?
— Bah... C'pas c'qu'on est, des compagnons ? »

Un concert de murmures et d’approbations suivit cette question.

« Compagnon, c'est un rang... aussi, et, surtout... La table des cartes serait plus thématique.
— Y a pas plus important que de discutailler d'un nom ?
— Si, sûrement. Je pense que, dans l'immédiat, notre travail se situe ici. Tout éteindre, et rebâtir un début de maison.
— Je ne le pense pas
, se manifesta Kalirr. La fumée a attiré l'attention des pilleurs. L'endroit n'est plus aussi secret.
— Dans ce cas, nous devons ramasser tout ce qu'il reste, et l'amener ailleurs.
—  J'ai une question
, osa Kucci.
— On t'écoute.
— Qui seront les Acolytes des fiers Compagnons qui m'entourent ? Je n'ai jamais vu d'autres visages de la Main que ceux présents ce soir, ou ceux décédés, ou disparus.
— De nouvelles recrues, peut-on espérer.
— Les nouvelles graines qu'on sèmera dans not' jardin, j'imagine ?
— Mmh, entendu.
— C'est, en effet, une étape primordiale. Nous devons reconstituer nos rangs.
— Je ne pense pas que recruter soit une priorité
, avoua l’aveugle. Nous devons reconstituer nos rangs. Pas avant d'avoir stabilisé la situation.
— C'pour ça qu'il va falloir que tout l'monde se charge d'une tâche à accomplir. En fonction de ses capacités. 'fin, vous en pensez quoi ?
— Nous savons déjà que Garnan, Kucci et, si les informations du Coeur sont exactes, Shanigami ont quelques projets derrière la tête…
— C'est exact
, acquiesça le premier.
— Je vous écoute !
déclara Adellan, carnet de notes à l’affût.
— Ah mais n'écoute pas et propose ! Tous égaux !
— Donc quoi ?
revint en arrière Shanigami. Le Coeur recrute. Le Pique tue les Opalins, le Carreau construit un manoir et le Trèfle ouvre ses coffres.
— Les Opalins ? Doucement avec les Opalins !
— Pour les Opalins, nous sommes parvenus à un accord
— La situation se stabilise avec peine, de leur côté. »

Les discussions dérivèrent, après celle-ci, sur le sujet de l’emplacement idéal d’un nouveau repaire. Adellan proposa de mettre à contribution sa connaissance du monde pour dégoter l’endroit rêvé.

Suite à quoi Arlène leva une main gantée.

« Oui, Arlène ?
— J'me chargerai du renflou... du rembou... de l'apuration des dettes.
— Dès que nous en aurons terminé ici,
l’appuya Kalirr, ce sera ma seule et unique tâche à moi aussi.
— J’ai mis de côté, depuis quelques années
, les épaula Instylena. Je peux avancer quelques frais pour le Lépreux.
— C'est chic de ta part !
— Mon dojo devrait normalement être vite rentable
, annonça Garnan à la cantonade.
— Du coup, qui c'est-y qui s'occupe de quoi ? T’as tout noté, le masqué ? »

Adellan fit signe qu’il était en train d’y oeuvrer.

« Je serai ici chaque jour de cette semaine avec des proches, pour déblayer et ramasser, annonça l’Eniripsa aveugle. Tous ceux qui pourront nous aider seront les bienvenus. On se retrouvera, une fois cela terminé, à la planque du Château.
— J'aiderai !
se proposa l’anthropologue au Nomoon.
— Je passerai si j'ai le temps aussi ! promit Garnan.
— J'ai... un projet en cours. Shanigami hésita. Il pourra nous servir à nouer de futures relations. Que ce soit dans l'intérêt du Trèfle ou de la Main. Et j'y prévois également une succursale pour le Pique.
— C'quoi ton projet, Shani ?
— Hum... Je peux vous en toucher deux mots puisqu'Arlène m'a aidé en ce sens.
— Et, les autres, vous vous proposez pour quoi ?
— Ecoutons Shanigami.
— Je suis en train de faire construire une maison... de passe. Les informations sont souvent dites avec plus de facilité sur l'oreiller. Et, quand on aime, on compte moins ses kamas.
— Ah, c'était pour ça, les...
— Tu as déjà les péripatéticiennes ?
— Je compte transformer une des chambres, en une salle d'interrogatoire pour le Pique. En gros, une chambre donnant sur une salle secrète. Et ce sera un moyen très simplifié de capturer certains individus. En leur attribuant la bonne chambre.
— ‘faut une bonne isolation, mais Madden Claude serait fière que tu suives ses pas.
— Ce s'ra ouvert quand ?
— Je n'ai pas encore mes... employées. J'ai mon réceptionniste. Un gobelin du nom de Gobtropktine, rencontré en mission. Il n'a aucune attache et sera parfait pour garantir le secret de l'endroit tant qu'il sera entretenu.
— Sinon
, s’aventura Adellan, j'ai une amie à Srambad qui travaille dans ce domaine.
— Srambad ?
— Oui. Elle est dans une maison.
— Envoyez vos candidats. Je me ferai un plaisir de les recevoir.
— De mon côté,
embraya Kucci, le Théâtre est prêt. Il ne me manque qu'une programmation. Mais je ne suis pas contre de l'aide pour remplir ma salle.
— Et pour ce qui concerne mon projet de dojo,
suivit Garnan, ça avance. Il faut encore que je rencontre les potentiels maîtres d'armes mais ça va vite se faire !
— Et vous, Insty' et Aphro' ?
— Hum ?
articula la seconde.
— Je vais continuer d'entretenir le Lépreux, répondit la première, et organiser le nettoyage de ces lieux.
— Personnellement,
bâilla l’archère, je continuerai mes assassinats et remettrai une partie de mes gains à la Main.
— Ah... C'est gentil, hein… Mais c'est pas « une partie » qui suffira.
— Je veux bien renoncer à mon salaire pour un temps. Pour aider
, concéda Aphrodiane.
— Il va nous falloir plus que quelques contrats
, intervint Kalirr. Visez haut, risquez gros. Il n'y a plus grand chose à perdre, donc beaucoup à gagner.
— A ce propos,
se manifesta le Zobal du Pique, lors d'une de mes missions, j'ai volé plus que ce que je devais prendre à la base. J'ai fait les comptes, environ trois-cent mille kamas. Je comptais les investir mais... Si ça peut aider...
— Bien sûr que ça peut aider !
— Bien sûr,
confirma Kalirr, on prend. Ça comblerait un dixième de nos dettes...
— Concrètement,
s’énerva le Compagnon du Pique, tu voulais que je fasse quoi, Arlène ?
— Que tu te sortes les doigts du baba comme nous tous, si t'es de la partie, toi aussi ! R'garde c'qu'ils ont proposé.
— Ah, parce que risquer sa vie dans des assassinats de grandes cibles c'est pas se sortir les doigts pour la Main ?
s’offusqua l’archère. D’accord !
— C'pas aussi durab' que c'qui vient d'être mis sur la table.
— Tu veux quand même pas que je mette toute ma fortune personnelle et mes hommes au service de la Main par hasard ?
— Ah, c'est gentil de proposer, merci !
— Tu rêves. »


Devant la stérilité de cet échange, Kucci ne put s’empêcher de soupirer.

« Arlène, Kalirr, Emyn... Y a-t-il autre chose que vous vouliez nous montrer ?
— Ouais, mais pas ici !
— Bien
, conclut Instylena. Si chacun sait ce qu'il a à faire, j'ai des corbacs à envoyer si on veut un peu de main-d'oeuvre ici demain.
— Posez vos questions s'il vous en reste
, ajouta Kalirr. Nous ne nous reverrons sûrement pas avant un bout de temps.
— Il nous faut de l'argent, certes. Mais il nous faut aussi des hommes. Comment on recrute ?
— Mon dojo devrait amener de potentielle recrues.
— Le Théâtre peut servir à trouver des agents pour le Coeur, si vous me le permettez.
— Ces deux solutions inspirent-elles le Pique et le Trèfle ?
— Aphro' pourrait peut-être recruter certains de ses « hommes » ?
— Je doute que le Trèfle ait besoin de nouvelles recrues dans l'immédiat. Je pense plutôt que centraliser les comptes entre Kalirr et moi sera plus simple.
— C'est pour la contrebande que le Trèfle a besoin de main-d'oeuvre. Cela peut attendre que les comptes soient sains.
— On n'a pas pu joindre Olgah, le Thomas et le Basilio. 'sont trop loin.
— J'espère qu'il ne leur est rien arrivé.
— A ce propos, nous risquons d'être fort occupés prochainement.
— J'ai beaucoup à faire pour renflouer les caisses et rembourser les dettes.
— Une telle transition, et dans une telle situation, accaparera beaucoup de nos efforts. Comme c'était déjà le cas depuis plusieurs mois, cela dit.
— Avec Arlène,
ajouta Kalirr, nous avons quelques idées mais il nous faudra nous éclipser un certain temps.
— Pas de problème, on gère !
— Si l'on veut que la Main s'remette de sa manucure forcée, il va falloir que tout le monde la mette à la pâte !
— Alors action. »


Vint l’heure de la séparation.

« Quelqu'un rentre sur Astrub ? demanda l’aveugle.
— Je te raccompagne, se proposa aussitôt son soupirant à la carnation si particulière.
— C'est parti.
— Je rentre aussi
, annonça l’archère du Pique.
— N'hésitez pas à laisser un message au Lépreux pour me contacter
, rappela le Compagnon du Trèfle.
— Moi, je dors en havre-sac,
expliqua Adellan, alors je peux rester pas loin. »



Illustration : Secret meeting among the ruins, par (Jan) Michael Ruyten
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[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. Empty Re: [Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier.

Message par Le Valet Noir 06.10.21 0:53

[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. 1633473882-trou-dans-le-sol


Ayant dormi à quelques mètres de là, son havre-sac suspendu à une branche d'arbre, Adellan arrive tôt sur les lieux le lendemain de la réunion. Il entre dans ce qu'il reste de la bâtisse, se dirigeant vers la pièce indiquée par Arlène la veille — là où se trouvaient des fragments d'os.
Avant d'entreprendre quoi que ce soit, il déchire une page de son carnet, gribouillant la note suivante : « Je commence les recherches. Rejoins-moi quand tu peux. » Puis il fait signe à Nanab, à l'aide de mimiques, d'apporter la missive à Instylena (oeil barré, ailes), au Lépreux Chauve (bière, bâtiment, fantôme). Le mot est confié au primate qui avale la potion de téléportation de son maître.
Sans toucher à rien, Adellan, en attendant, commence à observer plus en détail d'hypothétiques restes du Valet ; les retrouver et éteindre les restes de flammes seront ses priorités.

Le primate parti, dans les brumes matinales, voilà que le masqué s'était mis à visiter — et fouiller — les ruines encore fumantes où crachotaient quelques flammes quand il ne s'agissait pas de reprises de foyers qui flambaient allègrement, bien que dépourvues de combustible apparent.

Certains des feux auxquels s'attaqua Adellan lui firent une nique ignée. Manifestement, leur origine n'était pas à chercher du côté de la nature et de la logique, mais peut-être à mettre sur le compte d'effets secondaires résiduels de la combustion de quelque objet enchanté, désormais disparu.

Dans l'une des salles indiquées par l'arlequine du Pique — dont les Doigts connaissaient enfin l'implication précise au sein de ce qui avait été la Main du Valet Noir — Adellan discerna ce que sa coreligionnaire avait pris pour des restes humains. Il fallait avoir l'oeil pour les distinguer des escarbilles et autres morceaux de charbon. Sous l'effet de la chaleur, les os avaient éclaté, mais c'en était bien. Cela ressemblait à des phalanges... Du moins, c'est l'impression qui prédomina chez le tout nouveau Compagnon du Pique. Le reste de la dépouille — s'il en subsistait — devait se trouver sous l'amoncellement de gravats ayant résulté de l'effondrement de la partie supérieure de l'édifice. Arlène n'avait apparemment réussi à extirper que ces quelques reliques, que d'aucuns pourraient considérer avec dévotion.

En tant qu'anthropologue, Adellan s'y connaissait plutôt bien en anatomie humaine. Il les récupère en attendant sa collègue — il avait de très mauvais souvenirs de feu magique et préférait un peu d'aide.
Consultant les gravats du regard, il enfile son masque du Psychopathe - oui, encooore. La colère des derniers événements remonte et, armé d'une force nouvelle, il commence à les dégager.

Le feu de la colère n'a rien à envier à celui qui couve sous les débris, et il faut à Adellan bien plus que de la ténacité pour poursuivre son oeuvre, alors qu'il se brûle les mains et que sa peau ne commence à cloquer douloureusement.

Ouille. Bon, tant pis, il va s'étaler de la crème dans son sac ; ses mains sont ses outils de travail, aussi bien pour manier la plume que la dague ou tailler des masques. Pas question de les abîmer davantage.
Ceci fait, il parcourt le reste des ruines, cherchant des objets du Trésor n'ayant pas ou peu été détruits.

Les ruines semblent réagir à la présence de l'intrus. Ce qui reste de parquet grince, craque ou se fend au fil de l'avancée du Zobal inquisiteur. Certaines poutres achèvent de s'effondrer après qu'une pierre de trop a été déplacée, il ne fait pas bon traîner dans les parages. Les quelques meubles encore vaguement reconnaissables sont couverts d'une épaisse couche de suie, défoncés ou gisent au sol, éclatés comme autant de coquilles d'oeufs malmenées.

Le contenu de l'étage — si l'on peut le nommer ainsi — s'est retrouvé sur celui du rez-de-chaussée. L'effondrement de la partie supérieure de l'édifice laisse peu d'espoir de retrouver quoi que ce soit d'intact ici.

Le Zobal soupire ; éteindre les flammes semblait être la première chose à faire. Il s'assied non loin des restes du manoir pour écrire, non sans douleur, complétant ses notes de la veille en attendant sa collègue.

Pendant qu'Adellan se résigne à attendre, un bruit attire son attention en lisière de forêt. D'abord sur le qui-vive en apercevant un Crâ souriant, arc à la main, il se détend en apercevant Nanab sur l'épaule de l'archer. Ce dernier est bien vite abandonné par le primatequi se rue vers son ami. Après un signe de tête, le nouveau-venu repart rapidement dans la forêt.

Quelques minutes plus tard, cette fois par le sentier, arrivent trois personnes : le même Crâ mène la marche, suivi par un minet grognon et une aveugle qui n'a rien à lui envier.

« J'apprécie ton enthousiasme, Jinka, mais tu as de la chance qu'on soit arrivés ou nous t'aurions laissé seul.
— Que de la gueule ! Sans moi, vous y seriez encore !
— Silence, tous les deux. Ad' ?
— Ah ! »


Adellan sort une bananagrume et un peu de fromage — oui, oui, du fromage — de son sac et les donne à son singe qui vient les déguster sur son épaule. Se relevant, il vient à la rencontre d'Instylena et de ses deux acolytes.

« Bonjour ! J'ai commencé à regarder, je vous résumerai rapidement ce que j'ai vu pour l'instant. Mais il me semble plus correct de commencer par les présentations. »

Bien qu'elle soit aveugle, il interroge l'Eniripsa du regard ; ses yeux rouge rubis visibles derrière le masque expriment visiblement de la surprise.

« Très juste. Je te présente Jinka, pisteur de Saharach, en voyage sur le continent, et Giusma, Marchombre et alchimiste. Je réponds des deux concernant leur silence, mais pas les bêtises qu'ils peuvent s'envoyer.
— Super, paye ta présentation. Accessoirement, c'est Insty' qui m'a formé et grâce à moi qu'elle à la vie sa...
miaule le minet avant de manger un coup de coude bien placé.
— Moi, je la trouve bien cette présentation ! Désolé de ne pas avoir dit bonjour tout à l'heure, je suis de nature prudente.
— Adellan, enchanté. C'est normal d'être prudents, voyons ! »


Le masqué serre la main des deux nouveaux-venus, et se tourne vers Instylena.

« Je ne sais pas ce que tu leur as raconté, mais, pour commencer, sachez que de nombreux feux magiques brûlent encore ; je n'ai pas trouvé de moyen pour les éteindre et je n'aime pas trop jouer avec ce type de magie, aussi j'apprécierais votre aide et vous recommande la plus grande prudence. Ensuite, l'étage s'est effondré ; je ne sais pas où était situé le Trésor, j'espère qu'il ne se trouvait pas en haut ou nous n'en retrouverons que des miettes. »


Il plonge sa main dans une des poches de son short et en sort les fragments d'os.

« Des restes humains. Peut-être ceux du Valet.
— Les feux, c'est mon rayon
, répond l'Ecaflip. J'ai apporté de quoi les tester avec divers produits, pour trouver comment tout éteindre. Ça me prendra du temps, par contre. Le minet tapote sa besace d'où parviennent des bruits de pots.
— Fais voir les restes ? intervient l'archer. Identifier la personne, impossible, mais je peux au moins trouver la partie du corps. Si tu peux m'emmener là où tu les as trouvés, je chercherai à en savoir plus. »

Le Crâ enfile des gants, s'approchant de la main d'Adellan.

« Les os, me semble-t-il, sont des phalanges. Je m'y connais aussi en anatomie, nous pourrions nous entendre. Il semblerait que le reste du corps soit enfoui sous des décombres, mais je n'ai pas réussi à les dégager malheureusement. »

Il tend quelques fragments à Jinka, avant d'entrer dans la maison, retournant dans la pièce où il les avait trouvés.

« Suivez-moi ! Tout porte à croire que le reste du squelette est là-dessous. »

Le petit groupe suit le masqué jusqu'à sa trouvaille. Une fois sur place, Giusma se dirige vers un des feux colorés avec Instylena, tandis que Jinka commence à observer les abords du corps. Nanab vient mordiller le Crâ, inquiet.

« Les pierres sont brûlantes, le prévient le Zobal, je m'y suis déjà abîmé les mains. Fais attention.
— Hey, doucement, petit. J'ai pris mes gants les plus épais, ils m'ont aidé dans le désert, espérons qu'ils tiendront ici. »
lui répond l'autre avant de tester l'épaisseur des gants sur une des pierres.

Le cuir des gants de l'adepte de Crâ protègent les mains de ce dernier... un temps. Après avoir soulevé quelques lourdes pierres taillées, il lui faut bien se rendre à l'évidence que la chaleur ne fait qu'augmenter et que ses mimines risquent fort d'en pâtir s'il continue de s'entêter.

Le pisteur regarde ses gants déjà attaqués et grogne :

« Et bien, ils auront fait leur temps.
— Je vais dans la forêt chercher un point d'eau ! Ça les rafraîchira peut-être. »


Adellan s'éloigne, Nanab perché dans sa tignasse bouclée tandis que le Crâ acquiesce, puis commence à observer le peu qu'il a dégagé.
De leur côté, Giusma et Instylena ont fini d'installer leur verrerie sur une surface plate, et l'Ecaflip commence à observer le feu qu'il a choisi.

Le Zobal se rappelle de leur randonnée nocturne de la veille. A un moment, le groupe avait franchi un ruisseau. Nanab avait d'ailleurs criaillé à l'idée de prendre un bain forcé. Voyons... Il devrait pouvoir retrouver le chemin en suivant la sente si... Oui ! Après une vingtaine de minutes de recherches, le masqué finit par trouver le cours d'eau.

Jinka n'est guère satisfait de son oeuvre : sous les gravats, nulle plage, rien d'autre que d'énièmes fragments d'architecture. Giusma, en revanche, apprécie davantage le spectacle qui se tient devant lui : le foyer sur lequel il a jeté son dévolu semble trouver sa force dans autre chose que les combustibles classiques.

Satisfait, Adellan remplit une grosse outre qui pendait le long de son sac. Cinq kalitres d'eau plus tard et un singe trempé par son maître hilare, il reprend le chemin du retour. Il a un très bon sens de l'orientation et retrouve sans peine le manoir, se dirigeant vers Jinka non sans avoir constaté l'avancée des recherches du côté de l'alchimiste.

« Et voilà !
— Bien, commençons à tester tout ça. »


Le poilu commence à chercher dans ses pots, et verse diverses poudres sur le feu, notant scrupuleusement chaque réaction. Derrière lui, Instylena avance d'une main experte sur la verrerie, montant alambics et tuyaux tarabiscotés.

« Ah, merci. Essaie donc d'en verser sur ces pierres-là, mais prends garde, elles ont tendance à exploser au contact d'une eau fraîche. Espérons que ça suffira pour pouvoir les déplacer. »

Le Zobal invoque un bouclier magique — une sorte de bulle rouge transparente composée de multiples hexagones — autour de lui et de Jinka, et verse l'eau froide sur les roches désignées par le Crâ. Ce dernier protège ses yeux et sa tête, roulé en boule.

« T'en fais pas ; avec mon bouclier, tu crains rien ! »

Conformément aux affirmations du Crâ, certaines pierre de taille se fendent en recevant le liquide. L'eau se change en vapeur et permet, un temps, au Crâ de poursuivre son gros oeuvre de déblaiement. A force de multiplier les allers-retours, le duo d'excavateurs met au jour ce qui reste du sol de cette salle de la bâtisse. Celui-ci est défoncé, et pour cause : il s'est écroulé sous la masse de débris, révélant l'existence d'un sous-sol. Se peut-il qu'il s'agisse de celui dont faisait mention l'arlequine, la veille au soir ?

« Génial ! On y va ? »

Adellan s'empresser d'aller informer les deux autres de leur découverte.

« J'admets que je serais plus rassuré que le petit y aille d'abord. Plus léger, il va pouvoir se faufiler là où nous n'irons pas.
— Hum... Mouais, sûrement. »
marmonne le masqué.

Peu rassuré à l'idée de laisser Nanab filer seul, il s'y résigne cependant et transmet des consignes au primate : il parle tout en faisant des gestes sophistiqués, mais la voix est clairement là pour capter l'attention du singe et permettre à son maître de ne pas s'embrouiller.
Ses doigts, particulièrement longs et fins pour un homme, terminent leur gestuelle par une petite caresse sur la tête de Nanab. Ce dernier s'enfonce dans l'abîme, telle une bouche d'ombre prête à l'avaler. L'inquiétude du scientifique est perceptible malgré son masque.

Nanab se glisse entre les décombres, mais remonte bien vite ; les deux n'ont apparemment pas terminé leur travail. Adellan jette une nouvelle fois de l'eau sur les pierres, puis laisse sa place à Jinka.

Au rythme pris par leur duo, les excavateurs estiment que se frayer un chemin sécurisé dans ce qui devrait servir d'ouverture sur les entrailles du manoir leur prendra une journée pleine, si pas deux.

Quant aux alchimistes, l'un et l'autre constatent autant qu'ils déduisent que les feux épars prennent et se nourrissent de la magie résiduelle présente en ces lieux. Les courants élémentaires ne semblent pas étrangers aux départs de feux, mais ils n'expliquent pas leurs naissances à eux seuls.

Adellan soupire, fatigué après quasiment une journée de labeur. Son hamac lui paraissait si confortable désormais.

« On peut reprendre demain ? Mon havre-sac est accroché dans un arbre pas loin. Si vous souhaitez y passer la nuit, ça ne me dérange pas. Après, l'intérieur c'est une jungle ; la seule différence avec la forêt, c'est que vous n'y croiserez pas de bêtes, à part Nanab. »

Il se dirige en bâillant vers le sac en toile décoré de motifs tribaux. Le reste du groupe accepte l'invitation, et tous finissent par s'endormir là où ils peuvent dans le havre-sac, souvent en tas.
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[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. Empty Re: [Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier.

Message par Adellan 06.10.21 15:20

Ils auront eu droit à des sacs de couchage tandis que le Zobal regagnait son hamac, et à un petit déjeuner à base d'omelette faite maison. Le tout entouré des nombreux masques qui décorent la pièce, accrochés aux branches et les toisant d'un regard vide. La chance.
Quoi qu'il en soit, le lendemain, le scientifique et l’archer reprendront la fouille avec le même système que la veille. A force de persévérance et d'huile de coude, et malgré des dos en compote, le binôme de terrassiers parvint à étayer un passage étroit, certes, mais solide vers le sous-sol du manoir.

- Bon... On y va ?

Adellan tourna la tête vers Jinka. Le soleil était haut, midi devait être passé.

- Doucement, mais efficacement.

Le Crâ descendit et Adellan lui emboîta le pas, prêt à invoquer un bouclier en cas d'éboulement.
La progression, malaisée, s'accompagna de quelques glissades fort peu maîtrisées et d'une certaine quantité de poussière soulevée. Le plafond avait été crevé par les débris de l'étage et était venu s'écraser sur ce qui avait tout l'air d'un énorme fût d'alcool — sans doute du vin. Nanab, son maître et Jinka se trouvaient désormais à l'intérieur d'une cave. Tout portait à croire qu'il s'agissait de l'endroit évoqué par Arlène.

[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. Jason-cole-winecellar7

L'endroit n'inspirait pas confiance à plusieurs titres : l'instabilité de l'édifice, en premier lieu, fit retentir une sonnette d'alarme dans la caboche du Crâ tandis que l'obscurité, l'étendue, l'âge et le mystère nimbant l'endroit le firent frissonner à l'idée de s'éloigner du seul puits de lumière à leur disposition.

Après avoir commenté l’odeur qui régnait dans les lieux et enfilé un masque à vision nocturne, Adellan s'approcha du fût, frappant doucement dessus pour savoir s'il était creux ou non. Il abandonnera cependant bien vite l’initiative, apercevant, grâce à la vision conférée par son masque, un panneau de bois bienvenu.

- Là-bas, une porte.

Il la pointa du doigt, remerciant mentalement son masque de cuivre. Le nomoon s'en approcha, montrant le chemin à Jinka.

- Ça me semble être le seul accès ici. Allons-y.
- Si je crève ici, ç'aura été une belle aventure...
- J'ai ma magie, ne t'en fais pas !
- Curieux de voir ce que tu ferais contre quelques tonnes de débris.
- Certes.


Nul besoin d'en venir à de telles extrémités, les Nordes semblaient déjà avoir envie de découvrir ce qu'il adviendrait des explorateurs face à une avalanche de casiers à bouteilles. Dans un fracas assourdissant, d'innombrables capsules de verre s'abattirent sur le passage du Zobal et du Crâ après que leur mascotte adepte des bananagrumes se soit aventurée sur une étagère où elle n'aurait pas dû poser les pattes.
Jinka se protégea le visage et la nuque, se ramassant accroupi, tandis qu’Adellan bondit en direction de son singe, affolé.

- Nanaaaab !

Un grand bouclier magique vint protéger Jinka, mais Adellan avait mal visé et n'était pas bien protégé par son sort. Dans la panique et l'obscurité, difficile de savoir s'il s'agissait de sang qui suintait de vilaines coupures ou bien de coulures vineuses qui poissaient les vêtements de l'un comme de l'autre. Toujours est-il qu'un obstacle de plus se dressa sur la route des fouineurs : une marée de tessons de bouteilles et autres éclats de verre.

- Nanab…? T’es où p’tit gars ?

Un cri plaintif émergea de l'obscurité. S'il voulait conserver l'intégrité de ses papattes au cuir épais, le Nomoon allait devoir la jouer fine. Le masqué semblait se contreficher du reste ; seule la vie de son singe comptait. Adellan s'avança avec agilité vers Nanab, esquivant le plus possible les morceaux de verre.

- Tu me vois p’tit gars ?!
- Fait attention où tu mets les pieds !
- Tout va bien là-dessous ? Jinka ? Adellan ?
- J'ai de bonnes bottes, mais pas lui.
- Tes bottes vont pas faire long feu. Ouais, on n'a rien ! On se débrouille, mais dis à Insty' d'être prête !
cria Jinka en commençant à dégager les tessons sur le trajet jusqu'au masqué.

L'agilité, tout masque à vision nocturne pris en compte, était relative. Le Zobal manqua de se casser la figure à deux reprises et ce fut sa troisième perte d'équilibre — la peste soit de ces grands crus qui humidifiaient le sol — qui lui fit lâcher un râle de douleur : il venait de s'étaler et, dans un réflexe malheureux, s'était réceptionné sur ses mains, désormais criblées de morceaux de verre. Vaille que vaille, les dents serrées et les yeux larmoyants, le dresseur retrouva son animal savant. Ce dernier lui sauta dessus, le transformant en perchoir de fortune. Il y avait fort à parier que la brave bête ne chercherait plus à descendre des épaules du Zobal tant qu'ils n'auraient pas quitté ce terrain miné.

- Tsk. Abruti, je t'avais prévenu. Ne bouge plus, je déblaye un chemin et on t'emmène voir Insty'.

La méthode du Crâ porta ses fruits. Ses amples raclements lui permirent d'ouvrir un chemin sans s'exposer à la morsure froide et acérée du verre brisé, bien que ses bottes absorbèrent, dans la manœuvre, une importante quantité de liquide.
Pendant ce temps, à la surface, l'Ecaflip penché au bord du trou sentit ses moustaches roussir. Un courant d'air chaud vint hérisser les poils de sa nuque. Quelques étincelles se mirent à crépiter à l'orée de son champ de vision, au plus loin que pouvait porter son regard dans le tunnel menant au sous-sol obscur.
De son côté, le farfelu semblait n'avoir cure de la douleur malgré le sang qui maculait ses mains. Trop heureux d'avoir retrouvé son petit singe, il lui faisait de grosses papouilles — assez comique de la part d'un homme de sa stature. À la fois adorable et niais. Ils se dirigèrent vers la sortie, une pause-Eniripsa ne serait pas de refus.
Mais…

- METTEZ VOUS A COUVERT ! hurla Giusma.

Adellan et Nanab furent surpris par quelques lumières vacillantes, situées entre l'issue et eux.

- Oh.

Un giga-bouclier apparut entre les étincelles et le duo, et le Zobal joignit ses mains ensanglantées dans une prière à ses dieux.

- Gors'nak Razad pericidil !

La panique se fit sentir.

- GORS'NAAAK !

Le « giga-bouclier » draina autant les forces du masqué qu'il prit de l'ampleur et se mit à appuyer sur la paroi du plafond. Ce dernier se mit à lâcher quelques plaques de mortier qui vinrent s'écraser sur la débauche d'énergie magique de l'homme aux masques. Les étincelles n'avaient guère explosé ou enflammé la cave : les vapeurs d'alcool étant trop peu nombreuses ou encore trop éloignées. C'était un nouveau — et petit — foyer qui s'était mis à flamber. S'agissait-il encore d'une de ces apparitions ignées inopinées ?

A l'air libre, l'Eniripsa eut un haut-le-coeur : le sol venait de bouger. Dans les instants qui suivirent, un feulement inquiet de son comparse vint confirmer ses craintes : lui avait clairement entendu un bruit de heurts et vu d'inquiétantes lézardes naître et zigzaguer à quelques kamètres de leur position. A la verticale de l'endroit où se trouvaient leurs camarades, selon ses estimations.

Jinka le Crâ, encore trop éloigné du duo, ne put que se demander ce qui se tramait. C'est à contre-temps qu'il réagit à l'appel de Giusma, plongeant au sol — déblayé, celui-ci — et se recroquevillant sur lui-même. Constatant que le danger n'était pas immédiat, il jeta un rapide coup d'œil alentour. Le pisteur expérimenté établit bien vite les faits, et il se redressa avant de filer vers la sortie aussi vite que possible, entre la position verticales et celle accroupie.

- Pitié, faîtes que son bouclier tienne le coup ! adressa-t-il rapidement en prière avant de se concentrer sur sa propre survie.

Le bouclier disparut à l'instant même où Adellan perdit conscience. Ce double évanouissement ne fut suivi d'aucun effondrement majeur… Toute cette panique à cause d’une fausse alerte !
Nanab couina et martela le torse de son maître de petits coups de poings, avant de laisser le scientifique inanimé et de fuser vers Instylena en voyant qu’il ne réagissait pas. Jinka se retourna une fois sous la lumière, s'estimant hors de danger immédiat. C'est à ce moment précis qu'il vit le petit singe affolé le dépasser.

- Iiiiik !

Nanab se jeta sur l'aveugle, lui escaladant la tête.

- La peste soit des inconscients, puissent-ils être heureux.


Le Crâ fit demi-tour, jetant Adellan en travers de ses épaules puis remontant péniblement vers la sortie.
De son coté, Instylena lâcha un cri de surprise avant de comprendre l'origine de toutes ces petits coups griffus, et tenta de calmer le singe. Mais ce dernier était déjà reparti, faisant des allers-retours entre le Crâ et l’Eniripsa, totalement affolé et croyant certainement son maître mort.

Jinka avançait lentement, le Zobal était lourd de par sa carrure et il n'osait faire trop de mouvements, guettant le plafond avec inquiétude. Ce dernier, aussi sombre que l'humeur d'un Chafer, crachotait irrégulièrement quelques bouffées de poussière. Intuitivement, cela rassurait Jinka autant que cela le laissait présager d'une funeste issue dans un avenir lointain : dans l'immédiat, il ne pensait pas craindre de finir ses jours sous des décombres. Mais qu'en serait-il dans quelques mois ? Dans quelques semaines ? Pire, dans quelques jours ?
Le Crâ finit par émerger, ruisselant de sueur. Giusma prit en charge le corps, et laisse une outre pleine d'eau fraîche auprès de son camarade, approchant l'inconscient de l'Eniripsa.

- Je ne vois pas de blessures apparentes autres que tous ces morceaux de verre dans ses mains. Il a perdu du sang, mais rien de fatal, je pense que c'est l'atmosphère qui lui a tourné la tête.

L'Ecaflip allongea Adellan, puis lui souleva les jambes, faisant revenir le sang dans la tête masquée.

Une poignée de minutes s'écoula avant que le Zobal se mette à grogner.

Pendant ce temps, Insty enleva délicatement les morceaux, s'assurant avec Giusma de ne rien oublier, puis entama à voix basse une litanie qui referma petit à petit les blessures. En réalité, c'était surtout une perte d'énergie qui avait causé la perte de connaissance de l’énergumène. Remuant un peu, Adellan finit par ouvrir ses yeux rouges, respirant avec peine. Nanab qui était parti pleurer lui fit la fête, bondissant dans tout les sens autour du groupe et accroissant la fatigue du masqué.

- Salut… commença le rescapé, avant de s’interrompre à cause d’une quinte de toux.
- Hé ben, 'faut manger plus le matin ! L’humour du Crâ sonnait faux, épuisé et encore inquiet.
- Ne bouge pas trop, je n’ai pas fini.
- Je mange plus que vous tous réunis, je crois… Hum, oui-oui Insty'. Il s’est passé quoi… ?
- Tu t’es ramassé dans le verre, puis évanoui en pensant que le ciel allait te tomber sur la tête.
- Ah. Au moins personne n’est encore mort, rajouta le savant en effleurant Nanab, qui se calma aussitôt.
- Nt! Pas bouger, j'ai dit ! C'est pas possible cette manie.

Ce simple geste affectueux avait suffi à exténuer le Zobal, mais l'avait fait sourire, ce que les autres n'avaient pas pu voir.

- Bon, je vais retourner là-dessous. Cette fois, je m'attache à une corde, et si je crie, je veux que vous me tiriez aussi fort que possible, d'accord ? On s'en moque si ça me fait mal, ça sera moins pire que le plafond dans la tronche.

- Je te rejoins dès que je tiens debout.
- Je suis curieux de savoir ce que cache cette porte. Et puis, on n'va pas abandonner face à des bris de verre, merde.
- Toi, tu bouges pas tant que j'ai pas dit oui.


L’aveugle mit une taloche au masqué, le faisant hurler de douleur plus que de raison. Adellan ne se fit pas prier pour l’insulter alors que Jinka, encordé, s’en retournait dans les profondeurs du manoir.

Illustration : Medieval Cellar, par Jacopo Colangelo
Adellan
Adellan
8♠
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Au-delà du Seuil, certains restent à demeure.
Furtivité II
Bah dis donc... On t'voit plus aux soirées ! Le deuxième niveau de furtivité permet au membre de se placer dans l'angle-mort de sa cible, en exploitant son environnement, les tiers présents, et les failles dans la vigilance des personnes suscept
Style de combat I
Le premier niveau permet de comprendre les rudiments de ce style de combat : l'esquive, les feintes, les bottes les plus élémentaires.
Trésor du Valet Noir
Par des moyens peu orthodoxes, vous vous retrouvez en possession d'une des pièces du Trésor du Valet Noir.
Linguiste
Le membre a appris une ou plusieurs langues ou dialectes étrangers, langage des signes, lecture sur les lèvres, etc. Il sera plus à même d’apprendre rapidement une autre langue.
Crocheteur
Cette compétence permet de venir à bout des serrures récalcitrantes. Le membre pourra ainsi pénétrer de l'autre côté des portes interdites.
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Message par Instylena 10.10.21 19:32

- De toute façon, c'est trop dangereux d'y retourner à deux. On risquerait de se gêner en cas de problème. Tu pourras aider le poilu à me sortir en cas de pépin !

Pendant que le zobal continue d'invectiver son médecin qui ne l'écoute pas, Giusma râle contre son surnom et se tiens près de l'entrée, aidant le cra à descendre. Au loin, le feu repéré plus tôt sert de fanal à l'archer, le guidant et l'éclairant sur les premiers kamètres. Il tire sur la corde pour qu'on lui donne du mou, et continue d'avancer jusqu'aux morceaux de verre. Là, il reprends sa technique la tornade verte de Konoha de balayage de pieds afin d'avancer. En haut, l''aveugle reprends sa litanie, apaisant un peu la douleur d'Adellan. C'est donc au doux son du verre contre le verre et des semelles crissant contre la terre battue que Jinka progresse, petit à petit, en direction de la porte. Parvenu devant l'huis, le Crâ s'immobilise, alerte. Une goutte de sueur roule sur sa tempe, et il observe le mur avant d'ouvrir la porte, pendant qu'un nouveau petit feu s'allume derrière lui, encore loin des combustibles.

Rassuré par l'apparence solide du mur, Jinka ouvre la porte qui tourne sans soucis sur ses gonds, dévoilant plus de ténèbres, ainsi qu'un lanterne abandonnée au sol. S'emparant de celle-ci, il utilise l'un des feux pour l'allumer, avant de faire une découverte décourageante : derrière la porte, il n'y a que des gravats, qui laissent indiquer que l'endroit servait du temps du manoir à accéder à la pièce d'où il vient. Il peste, avant de faire demi-tour en éteignant la lanterne, craignant qu'elle ne cause plus de mal que de bien.

- C'est bon, je peux le rejoindre ? s'enquiert un Adellan encore chancelant.
- Il a dit lui-même que tu le gênerai. Jinka est habitué à travailler seul, il va s'inquiéter pour toi si tu y vas.
- Et moi aussi. ajoute-t-elle en silence.
- C'est sympa de sa part, mais jusque là j'ai réussi à survivre comme un grand.
- C'est ce qu'on dit tous les grands morts avant de ne plus survivre un jour ! ricane l'Ecaflip.
- Certes, mais j'ai déjà été empalé, avalé, fracassé, brû-

Le retour du cra à la surface le coupe dans sa phrase, et tous écoutent son rapport.

- Alors y a rien. Derrière la porte, c'était l'accès à la cave depuis le manoir. J'ai bien une dernière idée, je bois un coup et j'y retourne.
- Et tu veux bien nous en faire part après t'être désaltéré ?
- Roh, laisse moi un peu faire mon mystérieux ! Comme ça si ça rate, j'aurais l'air moins nouille !
avec un sourire en coin, il redescend.
- Tututut, s'il te plaît.
- Je veux juste regarder les tonneaux de plus près. Au pire, j'y perds du temps, au mieux, on aura ptet quelque chose à boire, voir mieux ! ronchonne-t-il, déjà à moitié dans le trou.
- Tu remontes direct si tu trouves un passage dans un tonneau. Ou ailleurs. En attendant je mange.


Le sucre semble faire des merveilles au Zobal en manque d'énergie, et les deux autres restés en haut profitent de la collation avec lui. Jinka laisse ses yeux s'habituer, avant d'aller voir les barriques. Massives, leur longueur fait bien une fois et demie la hauteur du Crâ, qui comme son compère, il commence par toquer sur la barrique à diverses hauteurs, cherchant à déterminer le niveau du liquide - si tant est qu'il en reste. Il répète ses actions sur chaque Barrique, notant d'un coup de dague la hauteur estimée. Une fois son tour terminé, il retourne à la deuxième et troisième barriques, les seules à sonner aussi pleines que le crâne d'un adepte de Iop. Peu désireux de devoir forcer, il cherche avant tout un mécanisme sur la première des deux, mais l'opération dure, s'éternise et finit par virer à la persécution tonnelière. Il finit par s'avouer vaincu et se tourne vers le tonneau voisin, où il procède de même.

L'inspection poussée du second contenant massif dérange le fouineur. Quelque chose ne tourne pas rond de ce royaume de la boisson ou, du moins, dans l'un des deux réceptacles du divin nectar. Les deux barriques, pourtant semblables, diffèrent imperceptiblement dans leur conception. Cependant, les deux foudres étant éloignés, Jinka ne parvient pas à mettre le doigt sur le détail qui le chafouine et choisi finalement d'utiliser plus d'une paire d'yeux.

- Tsk. Adellan, ramène toi, et prends de la lumière !
- T'as trouvé quoi ?
- Y a deux barriques vides, mais j'arrive pas à trouver de mécanismes. Et y a un truc qui me chiffonne, je saurais pas dire quoi.
- Fais-voir... Bigre, pas passé loin celui là.
Un nouveau feu s'allume au passage du Zobal, non loin d'un râtelier à bouteilles.
- Je sais pas, y a un truc différent entre elles. J'espère qu'avec plus d'yeux et plus de visibilité, on trouvera. Au pire, on prendra une hache.


L'inspection est rapide : Adellan ne voit rien de plus, et le cra s'impatiente à vue d’œil. Pour un coureur des dunes, se voir résister par un tas de planches est particulièrement agaçant. Il va vers le trou, et gueule à Giusma de lui lancer une hache, qui arrive prestement.

- Bon, j'en ai marre et j'aime pas ces feux qui se multiplient. Aller, tiens les torches, on va voir ce qu'elles ont dans le ventre.
- Ça marche. Mais fais gaffe hein...


Après avoir transmis la torche, le cra entame une baston digne d'un iop, et la première barrique ne résiste pas longtemps aux assauts du bûcheron du jour. Un forte odeur de vin jaillit de son ventre rebondi lorsque Jinka vient à bout de la paroi. Un fond rougeâtre ondule légèrement à l'intérieur de l'imposant contenant. Jinka grogne, puis déterminé, il attaque l'autre. Bien que fatigué par sa première attaque, c'est avec l'expérience du trou précédent qu'il redouble d'efforts et d'efficacité : la seconde barrique se rend bien vite à l'évidence et s'avoue vaincue. Si une odeur de vin émane de ses entrailles, elle est bien moins forte que chez sa jumelle, et pour cause : l'intérieur en est aussi vide que sec, et c'est bel et bien l’entrée d’un passage, guère long de plus de trois kamètres et à peine plus large, menant à une dernière porte qui se révèle dans la lumière des deux torches.

- Enfin !
- A toi l'honneur !


Le masqué ne se fait pas prier, mais cette porte-ci est fermée à clef, ornée d'une belle serrure.

- Hm. J'ai des crochets dans mon sac, tu peux les attraper ? La petite poche de devant.
- T'inquiète, j'ai le mien !  
Il brandi sa hache, une lueur peu engageante dans les yeux.
- ... Je préfèrerai rendre hommage à l'ancien maître des lieux en utilisant une méthode qui lui aurait plu davantage.
- Comme tu veux, je reste à disposition si jamais ça rate.
- Bien sûr.


L'hommage était beau, l'intention louable, mais n'est pas maître du crochetage qui veut. La serrure résiste et les rossignols se brisent l'un après l'autre.

- Quoi ?! Eryne va m'entendre. Gorshmük. Bon, vas-y, tape.
- Chef oui chef.


L'huis craque, cède et se rend devant pareille débauche de violence. Si le propriétaire des lieux était encore de ce monde, nul doute qu'il condamnerait un tel comportement et un si criant manque de panache. Toujours est-il que les deux compères agrandissent l'ouverture et finissent par se faufiler de l'autre côté de la paroi de bois aux arômes tanniques, pénétrant pour la première fois dans la chambre plus-si-secrète-que-ça du petit Trésor du Valet Noir.

[Quête Majeure] Où l'on fonde les lendemains sur les ruines d'hier. Little11


- Maman disait toujours que j'aurais du faire Iop.
- J'y crois pas... Bon, qu'avons nous là.


Les intrus déambulent entre les trophées exposés dans la pièce, passant devant un piédestal surmonté d'un calice argenté, quelques volumes épais reliés d'un cuir crevassé et bien d'autres artefacts aussi inconnus que nimbés d'une aura de faste. Émerveillé, Adellan se met à chercher des masques, tandis que l'archer plus pragmatique se rends compte de l'entreprise qu'il ont devant eux. Dans la cave, le feu continue de flamber, dévorant de plus belle les casiers voisins, s'étendant aux alentours. De fins filets de fumée commencent d'ailleurs à serpenter le long du plafond, s'engouffrant, qui dans les fissures reliant le sous-sol à la surface, qui dans le tunnel reliant l'une et l'autre. Inconscient du danger, le Zobal s'émerveille, et  il s'empare d'un gros livre, qu'il reconnait grâce au titre : l'inventaire partiel du Trésor, qu'il consulte rapidement avant de s'emparer de deux masques. Le cra jette un œil en arrière soucieux.

- Va falloir choisir vite. T'as des infos ?
- Tu me le rends. dit-il avant de lui tendre l'inventaire, saisissant d'autres objets au fur et à mesure.
- Pas le temps de lire tout ça. On prends ce qu'on peut, tant pis pour le reste !
- Je pourrai pas en porter davantage, de toute façon. Prêt à foutre le camp ?


Le cra s'empare de ses objets, et considère les deux Orbalantyrs avant de se tourner vers le masqué.

- Si on a le temps, je reviens pour un de ces trucs. Tu m'accompagnes pour le deuxième ?
- Évidemment. Sortons d'ici maintenant avant d'être coincés.


Nanab, son maître et ses objets passent la tête hors du tonneau éventré, guettant les flammes, et suivis par l'archer. Le Masque de Mort échappe des mains encombrées d'Adellan alors que celui-ci s'apprête à franchir l'issue. Tombant au sol, l'objet sculpté rebondit et vient claquer son bord finement ciselé à proximité d'un épais volume de parchemin, et dans un réflexe béni par une Divinité Majeure — au bas mot ! —, le Zobal parvient à donner un coup de pied ascendant dans le masque au moment où celui-ci décolle du sol, le propulsant sur sa poitrine où il le cale dans une inconfortable position due à l'exploitation de son menton. Mû par une envie subite, Adellan en profite, tant bien que mal, pour s'emparer de l'épais volume. Lors de leur retour par la porte déverrouillée, les deux voleurs sont surpris par la forte luminosité qui les attend dans la barrique. Ça brûle, au-dehors ! Et plutôt deux fois qu'une. Les meubles encore debout sont en proie aux flammes et l'incendie ronfle avec vigueur.

- Bordel, file devant !
- Bigre. Aide-moi, p'tit gars. Insty, Guisma, balancez de l'eau si possible !


Nanab attrape avec ses pattes et sa queue le masque du Boucher et l'amulette, débarrassant un peu son porteur. Ce dernier s'avance, cherchant un passage, slalomant en veillant à ne pas trop s'approcher des flammes, tâche aussi ardue que vitale. Entre temps, les documents auront été rangés dans son sac à dos. Plus haut, les intéressés ont préparé des outres pour éteindre les compères. Le cra, lui, suit en courant son camarade.

La chaleur, la proximité du brasier et la panique qui prend le trio aux tripes poussent deux de ses membres à maladroitement laisser tomber l'une de leurs prises : Nanab laisse choir l'amulette, et ne semble même pas s'en rendre compte, pressé qu'il est de regagner la surface sans chercher à se retourner pour vérifier que son maître le suit bien, quant au Crâ, c'est cette espèce de talisman couvert de runes qu'il a ramassée qui fait les frais de sa précipitation. Le Zobal fonce jusqu'à la sortie qui s'approche, regrettant de ne pas avoir pris le temps de sortir son masque du Pleutre, et il finit par jaillir hors de la cave, vite arrosé par un Giusma inquiet. Jinka déboule à sa suite, et la douche impromptue le surprend par sa violence. En pleine ascension des éboulis, il est déséquilibré et glisse en contrebas. Bien vite remis sur ses guiboles, il entreprend de gravir à nouveau la pente qui se dérobe sous chacun de ses pas ; l'un d'entre eux met d'ailleurs au jour un cône de tissu défraîchi. Sans réfléchir, y voyant une prise, l'éclaireur se saisit de la chose et, tirant plus fort qu'il ne l'aurait cru, la dégage entièrement de sa gangue de terre et de poussière. Dans le feu de l'action, ses yeux ne reconnaissent pas la forme malmenée d'un chapeau. C'est haletant, trempé de sueur et tremblant d'émotion qu'il refait finalement surface pour se faire jeter au loin, tel un chaton, par un Giusma bien décidé à lui épargner un avenir de saucisse carbonisée.

- Mes masques n'aiment pas l'eau. Qu'as-tu ramassé ? Hé mais, c'est pas le Choipo ?!
- Par les dieux, plus jamais.


Adellan sort le document qu'il a attrapé en sortant et n'a pas eu le temps de consulter ; désormais, il peut. Il vient étaler les objets rescapés autour en veillant à ce que les autres n'y touchent pas. Le gros volume en parchemin ne présente aucune inscription sur sa couverture, toutes ses pages sont vierges, à l'exception de la première sur laquelle sont écrits quelques mots : « Assis sur le Trône de Gorbaste, mes secrets se révéleront au regard curieux. ». A son tour, le cra ajoute son butin devant le zobal, qui commence à identifier les objets.

- Alors, de mon côté... L'anneau de la Nuit, les masques du Boucher et de la Mort, l'inventaire partiel du Valet, un étrange livre que je pense être le livre des Secrets, la broche d'Héléna, et la griffe de Mort. Je crois bien que Nanab a fait tomber une amulette. Pour toi, l'arc est le fendeur de ciel. Le manteau, c'est celui d'Ombres et de Brume. Ensuite, l'orbe d'airain et l’œil de Pierre, ainsi que le choipo au dernier moment.
- Tu sais à quoi ça sert ?
- L'arc a sept cordes magiques. Le manteau permet de séparer son corps de son âme, comme un spectre... Le chapeau est une vieille connaissance. L'orbe permet d'envoyer quelqu'un dans la Dimension Obscure... et l'oeil aurait conféré le don de voyance à un trool.
- Et ben, c'est pas n'importe quoi, votre trésor.
- Je suis censé récupérer ces objets... Que sais-tu de nous exactement ?
- Pas grand chose ! Et a vrai dire, ma curiosité commence à être piquée... Tout ce que je sais, c'est que Insty est avec vous, et on s'en doit une mutuellement, elle et moi.
L'aveugle esquisse un sourire, tandis que Giusma lève les yeux au ciel.
- Giusma et Jinka sont deux amis proches, et nous nous sommes souvent sauvé les miches. Pas d'inquiétude à te faire, Ad'.
Tout en parlant, elle panse le bras du cra, qui a été mordu par les flammes.

- Bon. Sans toi, je n'y serais sûrement pas parvenu ; tu récupères un objet de ton choix parmi ceux que tu as ramené, et on continue les fouilles. Ça te va ?
- Tu veux continuer les fouilles avec ce brasier ?? Et puis, c'est votre trésor tout ça. L'arc est beau, mais s'il ne sert que 7 fois... J'aime autant garder le mien.
Adellan sourit sous son masque.
- Dans ce cas je garde tout pour le nouveau Trésor. Et par fouilles, je veux dire que j'aurais aimé pouvoir éteindre les flammes avant de partir, et retrouver le corps du vieux...
- Oublie ça. C'est du feu magique, pas moyen de trouver comment l'éteindre.
- Il y a forcément un moyen. Peut-être en cherchant leur origine, et celle du drame en même temps.
Il tends la broche à l'eniripsa. Pour les soins, et pour que tu ne te sentes pas lésée.

Adellan réparti les objets entre son sac, ses poches et la besace d'Insty, essayant de tout faire renter au mieux.

- Il serait bien... de lui accorder une sépulture décente, tu ne penses pas ?
- Je l'ai dit, il ne m'importait pas tant. C'est son idéologie qui m'attirait, et les autres.
- Il m'a indirectement aidé, financièrement et socialement. Sinon, au moins déterminer ce qu'il s'est passé ?
- Si tu le trouves, on l'enterrera. Quand aux causes... Je pense qu'une expérience aura mal tournée. Ou un banal accident de torches, qui aura entraîné quelques objets magiques...
- Certainement. C'est bête. Pas forcément l'enterrer ? Chez nous, on brûle les morts en haut des montagnes et on respire la fumée, pour être guidé par l'esprit des ancêtres. Lui, il serait déjà brûlé, mais on... Ouais, non, laisse tomber.
- Honnêtement, on devrait s'estimer heureux d'avoir pu sauver deux-trois trucs. Je pense qu'on reviendra plus tard, d'ici quelques jours ou semaines, voir s'il reste quelque chose à sauver, mais j'en doute.
- Sadida doit être contre cette initiative... Tant pis pour le corps. J'ai réfléchi à quelques endroits pour entreposer les objets. Tu as aussi des idées ?
- Je compte les garder en lieu sûr le temps qu'on ai trouvé un nouveau QG.
- Et tu penses à quoi par "lieu sûr" ?
- Ça, c'est un secret ! Sinon, c'est plus un lieu sûr. L'aveugle fait un clin d’œil dans le vide.
- Je vois. Si jamais, je connais une pièce dans un temple abandonné de Pandala, et personne n'ira les chercher au village Zobal. Et maintenant, puisque pour l'instant il y a peu à faire, on pourrait rentrer.
- Je pense qu'on a fini avec ces ruines, oui. Et puis, j'aimerai pas être là si ça explose à nouveau...
- Et bien, ce fût une bonne aventure ! Maintenant, beaucoup de repos pour moi...
Le cra passe la main sur ses brûlures.
- Hmm. Un peu l'impression de n'avoir servi à rien...
maugrée le matou.
- Pas de votre faute si ces flammes sont particulières. Je pense repasser bientôt, mais un peu de repos ne serait pas de refus non plus. Bonne journée et merci encore.
Il se retourne vers l'Eniripsa. Tu me contactes lorsque tu comptes récupérer les objets... Moi j'ai un livre à étudier.

Il s'en ira sur ces mots, et de leur coté, les trois zigotos s'en iront également, l'un râleur, l'autre jovial et fatigué. La troisième, elle, passe pensivement sa main sur une jolie broche ornementée, et sur une pierre polie à l'aspect d'un œil.



Instylena
Instylena
V♣
V♣
Mystérieux Papa Nowel
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Trésor du Valet Noir
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Miss Main 649
C'est le plus beau jour de sa vie !
Millésime 647
Où la Main recommence à faire parler d'elle.
Contrebandier
Navigateur, montagnard ou géographe, le contrebandier connaît les routes, les sentiers et les postes de douane ! Il sait par où et comment doivent transiter ses marchandises pour qu'elles arrivent au plus vite et sans encombre.
Négociateur II
Le négociateur expert maîtrise son art autant que son discours. Il n'aura pas peur de traiter avec des marchands, des commerçants ou tout autre personne rompue à l'exercice.
Gestionnaire II
Le gestionnaire expert a la maîtrise totale d'un réseau complexe. Il est en mesure de tout contrôler, du producteur au consommateur et n'hésitera pas à passer par des schémas complexes pour assurer la sécurité et la rentabilité de son oeuvre.
Commerçant
Le commerçant est un spécialiste de son secteur, il connait tout du produit aux clients en passant par la concurrence. Il s'agit d'une compétence personnalisable en fonction de la branche de l'agent.
Comédie I
Le premier niveau de comédie permet d’adopter une posture en face d’un interlocuteur, d’avoir déjà quelques bottes secrètes pour éviter les questions désavantageuses, et utiliser des techniques d’interrogatoire pour obtenir des renseignements.
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Millésime 649
Où la Main se pique de noblesse.
Millésime 650
Où la Main s'engage dans un bras de fer.
Millésime 651
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Fossoyeur
Si elles apprenaient que vous avez détruit la Main du Valet Noir, toutes les milices du Monde des Douze vous féliciteraient autant qu'elles vous jalouseraient.
Millésime 652
Où la Main se passe.
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A la fin, c'est toujours l'IRL qui gagne.
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