[Jugement] Xerona

Tous les membres de la Main du Valet Noir sont autorisés et conviés à participer au jugement ici présent, et chacun pourra s'exprimer librement ci-dessous.




Le temps se faisait long, dans la cachette de Xerona et ce n’étaient pas les visites de son tendre ami qui l’empêchaient de ressasser le déroulement des derniers jours.
L’adoratrice de Xélor se savait surveillée : un type, désigné par Kalirr, ne lui lâchait plus la grappe depuis qu’elle avait trouvé refuge dans cet abri agricole utilisé par les membres de la Main du Valet Noir.
Lorsqu’elle entendit le bruit de pas sur le plancher de l’étage supérieur, elle ne s’en formalisa pas, mais ce ne furent ni son amant ni son chaperon qui descendirent les quelques degrés qui la séparaient de l’air frais et de la liberté.
Ce n’était rien de moins que la Dame de Coeur en personne et sa présence en ces lieux n’augurait rien de bon.
Xerona tressaillit lorsque la très digne Scriabine embrassa la pièce poussiéreuse du regard, alors même qu’elle se couvrait le bas du visage d’un mouchoir censé la protéger des miasmes ambiants.
Xerona tressaillit lorsque la Matriarche Rouge ne daigna pas lui accorder plus d’importance qu’aux meubles vétustes qui composaient l’intérieur étriqué du tripot clandestin dans lequel elles étaient réunies, par la force des choses.
Xerona tressaillit lorsqu’une voix chantante, mi-amusée, mi-moqueuse, souffla à son oreille :

« Pas la peine de tirer la révérence, cocotte, on est entre nous. »

L’arlequine du Pique se trouvait derrière elle. Comment était-elle entrée ? L'avait-elle jamais quittée depuis l'incident ? Xerona n’en savait rien… et elle n’était pas au bout de ses surprises.

Le frottement d’autres semelles leur parvint de l’étage. Manifestement, nombreux étaient celles et ceux qui avaient décidé de suivre les traces de la Dame du Coeur. C’est ainsi que le nombre de leurs pairs, silencieux, commença à augmenter petit à petit, au fil des minutes.

Lorsque l’assemblée fut conséquente, Scriabine tira la carte dont elle tirait son titre d’une de ses manches de crinoline.
Si la Main du Valet Noir avait déplié autant de ses Doigts, en cette fin de journée, ce n’était pas pour partager le fruit de quelque rapine ou ourdir un plan aussi machiavélique que profitable, mais bien pour régler une affaire aussi inhabituelle que délicate.

Scriabine, dont la carte de la Dame de Cœur était mise en évidence dans l’interstice interdit de son chemisier et de sa poitrine, se plaça devant le comptoir improvisé derrière lequel Xerona avait été envoyée se poster.

« Merci à toutes et à tous d’être venus aussi nombreux. Ces événements sont rares, et c’est pourquoi ils requièrent l’attention de toute la Main, tant les petits numéros que les têtes. Cette séance sera l’occasion pour chacun de se questionner sur la morale qui est la nôtre, et d’en affirmer sa version de vive voix. »

Laissant le silence accompagner son ouverture solennelle, Scriabine replia élégamment un index manucuré au-dessus de son épaule et Xerona la rejoignit, tête basse. Elle reprit.

« Par souci d’efficacité, et parce que de nouveaux membres sont présents parmi nous depuis peu, il convient de rappeler les règles élémentaires qui nous permettront de mener à bien ce jugement :
• L'Acolyte nommée Xerona, ici-présente, devra répondre à toute question qui lui sera posée, si elle est en mesure d’y apporter une réponse.
• Tout membre de la Main ici-présent pourra poser la question de son choix à l'Acolyte, tant qu’elle n’est pas déjà occupé à répondre à une autre question.
• Des violences physiques, psychiques, ou magiques pourront être utilisées contre l'Acolyte si cette dernière s’obstine à garder le silence, tant qu’elle demeure par la suite en mesure de parler avec raison. »

L’énoncé de cette dernière règle fut froidement accueilli par Orgostafu.

« Pour rappel, Xerona est accusée d’avoir enfreint à deux reprise le Code d’Honneur de la Main du Valet Noir. Dans le cadre d’une mission pour l’Enseigne du Pique, elle s’est rendue coupable de meurtre à l’encontre d’une âme, si ce n’est « pure », au moins innocente, violant ainsi l’article 3 du Code d’Honneur. Ce faisant, et par la suite, Xerona a fait fi de toute discrétion et, à cette occasion, l’article 2 du code susnommé en attirant l’attention de la milice astrubienne sur notre organisation. Le Valet Noir ne souhaite pas interférer, et nous laisse l’entière responsabilité de gérer cette affaire comme nous l’entendons. »

L’émulation commençait à poindre au sein de l’assemblée, certains avaient déjà de nombreuses précisions à demander, qui au Pique, qui au Coeur, qui à la principale intéressée, ou bien encore les motifs qui se cachaient derrière tel ou tel acte. Il demeurait certains points d’ombre sur le déroulement des événements et il n’était envisageable, pour personne, de juger la Quatre de Pique sans avoir toutes les cartes en main.

J'ai une questions pour l'accusé !
Votre enseigne vous convient-elle ?

Xerona, pourrais-tu nous donner les détails de l'affaire ? J'aimerai juste savoir si ce ne sont pas tout simplement les choses qui ont déparés... Ce serait dommage de se priver d'un membre compétent, pour une bêtise qui ne se reproduira plus...

Contrairement à son habitude, Orgostafu semble plutôt calme, bien que nerveux -compréhensible, non ?- il tapote fébrilement des doigts sur la table, et couve Xerona du regard, ne détournant ses prunelles que lorsqu'un interlocuteur prend la parole.

Razaak écoute avec attention les paroles de Xerona et hoche la tête, la mine sombre. Pensif, il met quelques secondes à formuler sa deuxième question.

"Regrettes-tu ton geste ? Et penses-tu que tu aurais pu agir différemment ?"

Orgostafu se crispa; comme s'il se réveillait brusquement, sorti d'un obscur délire nocturne. Il se redressa sur son tabouret, sur lequel il était affalé, et tenta de croiser le regard de Xerona -semble-t-il vainement- durement, afin de lui rappeler de cette dure œillade où elle était, et ce qu'il se passait. Soudainement mal à l'aise, le séant endolori -ou  ruse peu habile- il entreprit de se lever -bruyamment-, et de se mettre dans un coin de la pièce, toujours à porté de vue.

Le voilà qui sentait son haut se coller à lui, ses cheveux s'alourdir, et son bénard le coller. Moite de sueur, et tendu comme il était, qui était le plus contracté des deux amants ?

Semblant perdre patience, Razaak répète plus sèchement sa question.
"Regrettes-tu ton geste ? Et penses-tu que tu aurais pu agir différemment ?"

Moins avenant, Orgostafu se retourne sèchement vers Razaak, et le jauge durement, avant de reprendre sa place, toutefois sans quitter le Crâ de Coeur des yeux, sévères reproches dans son coup d'oeil.

Firis attendit quelques secondes avant de prendre la parole à son tour, il ne pouvait pas, malgré son amitié avec Xerona tolérer le viol du code d'honneur de la main. Mais bon, ça aurait pu être lui à la place de Xerona et qu'est ce qu'il aurait fait à sa place. Firis prefera oublier cette image en se disant qu'Arlène ne l'aurait quand même jamais emmené dans une mission comme celle ci.
Le disciple d'Ouginak donna un léger coup de canne sur le sol pour attirer l'attention sur lui, relevant au passage une très grosse quantité de poussière.
Il lança un regard vide vers Xerona, en ignorant les plaintes de ses confrères, et lui adressa un léger sourire avant d'annoncer d'une voix forte mais calme :« Étais-tu dans ton état normal lors de cette mission, et si c'est le cas penses tu que ce que tu as fait pourrait se reproduire dans des missions futures ?»

Satisfait d'avoir obtenu finalement une réponse, le crâ se rassit au fond de son siège en silence. Désormais il avait obtenu toutes les informations nécessaires pour se forger une opinion et défendre la xélor lors du jugement. Razaak se mit donc à écouter la suite de l'interrogatoire, tout en commençant à construire un argumentaire dans un coin de sa tête...

Firis ne réagit pas face à la réponse décevante de Xerona. Il préféra tourner les talons et quitter la salle en se disant qu'il n'accepterai plus d'assister à ces interminables séances de tortures qu'il avait déjà trop vécu par le passé. Il se rappela notamment des moments où il était lui même à la place de Xerona interrogé par des gardes que l'aveugle avait rêvé de tuer maintes et maintes fois.

Le Crâ drapé d'amarante et de charbon voyait rouge, et broyait du noir.  
Il sentait son assurance amenuisée de seconde en secondes, voilà que la neurasthénie de l'homme reprenait le dessus sur sa détermination candide. D'atrabilaires pensées faisait face en son esprit.
Il s'emparait alors d'une sellette, et se laissait accabler par ses ruminements.
Il levait la tête vers Xerona, tentant de reprendre de l'allure. Se passait les mains sur le visage, et arborait une mine neutre, que ses yeux ne pouvaient adopter.

 

Nororo observa autour de lui les réactions des personnes présente un raisonnement lui vint :
"Si j'ai bien compris. Tu as, en quelque sorte, cédé à la panique ?"
d'une voix claire et très fluide.
"Mais ton entraînement ne t'a pas appris a ,justement, ne pas céder a la panique ?"

Nororo en avait assez entendu , certes Xerona avait brisé le code d'honneur ce qui était une faute grave, mais il l'a défendrais lors de son ultime jugement. Nororo se rassit avant de faire un clin d'œil bienfaiteur à Xerona.