Orno Toubie - Quelle étrangeté que le doute.

Pire encore, que de ressentir des doutes pour la première fois, après une vie entière de dévotion. Dans les yeux de sa commandante, la dame en noir saisissait le vacillement subtil qui ébranlait son assurance. Jamais elle n’avait détecté cela auparavant. Sa supérieure avait peur.

Il fallait se rendre à l’évidence. L’Ordre n’était plus en mesure de perdurer. Orno et les quelques survivants de son âge ne constitueraient jamais une relève solide, en mesure de remettre debout ce qui avait été dévasté par les autorités sufokiennes. La jeune femme était persuadée de n’avoir jamais été trahie par les siens. Pourtant les indices s’accumulaient. Elle ne voulait s’y résoudre mais devait finir par s’avouer qu’elle n’avait plus aucune idée de ce que lui réservait l’avenir.

Elle qui avait passé ses plus précieuses années à étudier au mot près les exactes préceptes de livres interminables ; elle qui avait investi toutes ses maigres forces dans un entraînement inhumain, où les lois n’existent pas, où la nature est transgressée par l’esprit des humains les plus acharnés ; elle voyait son monde s’effriter entre ses doigts, petit à petit, sans que rien ne puisse y changer quelque chose.
C’est en voyant les yeux humides de la commandante qu’elle réalisa que tout était fini. Faire voler des lames, réciter des litanies cryptiques, soulever des rochers, éviter tout contact extérieur, tout ça n’avait servi à rien.

Pour la première fois, Orno ne se sentait plus à sa place. Et elle replongeait dans l’insécurité envahissante de la solitude qui était la sienne avant que sa route ne croise l’Ayorha. Elle n’avait désormais plus cette confiance aveugle, dans laquelle elle s’était enfermée pendant deux décennies entières, cette confiance en la seule personne qui s’apparentait à l’image qu’elle se figurait d’une mère. Pourquoi resterait-elle à ses côtés ? Elle savait déjà vers quoi elle voulait se diriger.

Car oui, Orno avait désobéi. Elle avait fui les lieux après la catastrophe, après que toute sa vie eut été remise en question par les évènements tragiques de la base Ayorha. La plupart des siens n’étaient plus, les bâtiments étaient en branle, l’un d’entre eux pulvérisé, et tout ce qu’elle croyait savoir devenait flou.
Elle avait désobéi car elle avait rompu les frontières hermétiques avec l’extérieur. Quand, désœuvrée et livrée à elle-même pendant la période de flottement qui avait suivi les incidents de Sufokia, elle avait été amenée à se débrouiller entièrement seule, les échecs successifs l’avaient conduite en Astrub, première cité où elle avait pu trouver logement décent.

Pourtant sûre de tenir ses engagements auprès d’un Ordre alors trop occupé par ses conflits interne et trop éloigné pour avoir autorité sur elle, la jeune femme en noir fut attirée par la lumière. La lumière d’une taverne pourtant austère où, malgré sa réserve initiale, elle trouva ses aises auprès de bretteurs et combattants.
Amusée par ce nouvel environnement, et par l’étonnement que suscitaient les capacités de bretteuse exceptionnelle d’une jeune femme frêle, elle enchaîna les duels amicaux contre ceux qui le voulaient bien.

Toujours engagée dans la survie de son Ordre, elle avait même profité de ses connaissances en Astrub pour intervenir dans les affaires de l’Ayorha. C’est là qu’elle avait fait se confronter son univers et le monde extérieur, lesquels ne seraient, pour sûr pas compatibles. La réaction de la commandante fut polie et en apparence bienveillante, mais elle voyait là une impardonnable faute de la part de sa disciple. C’est à cet instant qu’elle avait lu dans ses yeux qu’il était temps de partir. Ses fautes ne lui seraient, quoi qu’il en fut, jamais pardonnées. Au-delà de ses rencontres avec l’extérieur, elle avait osé s’essayer ponctuellement à l’alcool, et même brièvement à la romance.

C’était avec un des habitués de cette taverne, le Lépreux Chauve. Elle n’avait pas donné suite à cette histoire, mais n’avait pas quitté la taverne pour autant. Plus elle y venait, plus elle y trouvait son bonheur. D’autres combattants, mais aucun soumis à d’absurdes règles restrictives. Libres. D’aller et venir. D’échouer et de vivre leurs ambitions. Elle les enviait.

Camille, le tenancier fantomatique, lui avait fait comprendre qu’il pouvait donner du travail à ses clients. Ne sachant pas vraiment ce qu’il en retournait, elle s’était alors néanmoins persuadée qu’elle voulait les imiter. Pourquoi elle aussi n’aurait pas droit à ce travail ? L’Ordre ne l’aiderait plus, et il lui fallait monnayer sa lame.

Un soir, elle croisa Emyn, Shanigami et Hadriniel. Elle connaissait ces têtes-là, et les soupçonnait d’être dans le coup, ce pourquoi elle brisa la glace. Elle fit face à la prudence des trois hommes, qui n’en dirent pas trop. Mais, bonne élève qu’elle était, elle avait préparé son coup, en calculant les revenus du Lépreux Chauve et en estimant les charges qu’il engendrait. Ca ne collait pas, il manquait quelque chose et, elle en avait la certitude, ça avait à voir avec les mystérieux contrats de Camille.

Emyn céda. Il admit à demi-mot que la jeune femme pouvait se rendre utile, à condition de n’avoir pas peur de prendre des risques.

Salut ! Je sais, ce n'est pas un choix très stratégique que de postuler en même temps que deux autres personnages, mais leurs candidatures m'ont enfin poussé à poursuivre la mienne, qui traînait depuis belle lurette. Aussi je laisse la priorité aux deux autres personnages puisqu'ils sont nouveau et que je ne veux pas faire d'ombre à leur intégration. Si vous voulez bloquer du temps pour un perso en priorité, Orno attendra. En plus, vous la connaissez tous probablement déjà. Merci pour votre lecture !

Mais ne priorisons pas ! Au contraire, une vague d'entrée colle très bien dans le RP de la Main qui a besoin de reconstituer ses rangs après la guerre contre les Opalins. Et qui sait ce qui va naître entre les Recrues entrantes : une solide complicité, une course sans merci à l'ascension ou une globale indifférence ?

Nous verrons bien ! En attendant, c'est un pour !